En cette an 1587, la France est en plein dans la huitième et dernière guerre de religion et se déchire en trois clans : le roi de France et les catholiques modérés, le roi de Navarre et les protestants, le duc de Guise et la Ligue ultra catholique. Une guerre dans laquelle les pays voisins sont très présents : si l’Angleterre soutient l’Eglise Réformée, l’Espagne, elle, aide la Ligue. Cette année là Henri de Navarre prépare une grande offensive contre la Lorraine et le duc de Guise…
DES RENFORTS POUR LESDIGUIÈRES
François de Bonne, duc de Lesdiguières, chef des huguenots en Dauphiné, s’est installé à Champ-sur-Drac. Il est menacé par les catholiques de Bernard Nogaret de La Valette, qui campent à Jarrie.
Voulant rejoindre les huguenots dauphinois, 4000 ou 5000 Suisses (certains disent 6000) commandés par Cugi envahissent le Dauphiné après avoir obtenu l’autorisation de passage du duc de Savoie. Ils déferlent sur le Grésivaudan. Le gouverneur du Dauphiné, Monsieur de la Valette, appelle à son secours Alphonse d’Ornano, gouverneur d’Aix en Provence, fidèle sujet du roi et qui, avec son régiment de Corses, ne rechigne pas à « casser du protestant » (comme on dit chez les Ligueurs), il l’a déjà prouve en pays cévenol ou en Gévaudan.
L’armée des Suisses avance, pillant, tuant, volant sur son passage nourriture et bétail (à l’époque, pas ou peu d’intendance, les armées vivant aux crochets des contrées traversées). Le 19 août 1587, venant du Grésivaudan en passant par Uriage, 12 compagnies de suisses, renforcés par 500 soldats français et une cornette de cavalerie, traversent Brié. Au total, ce sont environ 5000 hommes qui viennent renforcer les troupes de Lesdiguières.
L’ARMÉE DES SUISSES MISE EN PIÈCES !
Les premières compagnies huguenotes prennent la direction de Jarrie en passant par Mont Rolland. Dans les bois se cachent 700 hommes, dont les corses d’Alphonse d’Ornano.
Vers 10 heures, les mousquets font feu. Puis c’est l’attaque des chevau-légers. Les suisses résistent pendant plusieurs heures, mais cèdent peu à peu, rang par rang. De nouvelles troupes tentent de passer par les Angonnes : elles aussi seront taillées en pièce sur place.
Le soir, on décompte 3700 morts. Les survivants fuient dans l’Oisans ou sont faits prisonniers, avant d’être libérés moyennant rançon.
ALPHONSE D’ORNANO, LE POURFENDEUR DE SUISSES
D’autres engagements eurent lieu en ce 19 Août. A Vif où les Suisses furent mis en pièces comme l’indique Auguste Prud’homme dans son « Histoire de Grenoble »de 1888. A Uriage, comme le relate le Mémorial des Corses : « Alphonse d’Ornano acquiert la réputation d’un grand homme de guerre après la bataille d’Uriage, où avec des troupes inférieures en nombre, il tailla et mis en pièces l’armée des Suisses ».
Pour récompenser d’Ornano, Henri III l’élèvera à la dignité de Conseiller d’Etat en lui adressant ces mots : » Nul autre que vous, Monsieur, depuis Jules César et mon aÏeul François 1er n’a si glorieusement vaincu les Suisses ». Le duc de Nemours relate également , dans une lettre adressée au roi, la joie du pape Sixte Quint lorsqu’il lui annonça la déroute de l’armée suisse à Uriage en ce 19 Août 1587.
Deux ans plus tard, Lesdiguières s’alliera à ce même d’Ornano, entre-temps promu Lieutenant-Général du Dauphiné et Maréchal de France, pour reprendre Grenoble des mains des ligueurs et maintenir le Dauphiné sous l’obédience du nouveau roi, Henri IV.
LE CHAMP DES SUISSES
Deux ou trois charniers recueillent les corps des combattants. Aux Angonnes, le « champ des Suisses » s’étend entre l’ancien presbytère (grande maison située juste au-dessous de la chapelle) et l’oratoire.
d’après Robert Aillaud et Bernard Honoré